Faire la ville avec les habitan-t-es
Plaidoyer pour le Droit à la ville
La COVID-19 a provoqué une crise sans précédent. S’il est encore trop tôt pour mesurer toutes les conséquences, cette crise a révélé l’ampleur des inégalités sociales : la mortalité a été plus forte dans les quartiers populaires sous-dotés en services publics, au sein desquels les conditions de logement étaient plus difficiles et dont le contrôle policier était renforcé.
Dans certaines villes de Seine-Saint-Denis, la mortalité a augmenté de 128% par rapport à la même période de l’année précédente selon l’INSEE. Aujourd’hui l’urgence pour les habitant.e.s est à la survie. Il s’agit pour eux.elles de payer leur loyer et les dépenses liées à l’alimentation pour nourrir leur famille. Les dépenses de logement peuvent représenter en moyenne 40 à 50% des revenus du ménage. Le chômage partiel ou la perte d’un emploi multiplient les situations d’endettements et d’impayés.
Si les réseaux de solidarité et les organisations d’habitants ont permis de répondre à certaines situations d’urgence, ils ont besoin d’être soutenu pour contribuer à la construction des politiques publiques qui doivent être à la hauteur des enjeux.
Lors du premier tour des élections municipales en mars 2020, des organisations d’habitants de Grenoble, Lyon et Marseille ont initié la campagne « L’Agenda pour le Droit à la Ville » qui a permis de rassembler 350 propositions. Sans nous limiter aux échéances électorales, nous lançons une campagne de plaidoyer pour le second tour des élections municipales qui aura lieu le 28 Juin. Les élections sont une occasion de mettre en débat nos revendications pour la construction d’un agenda pour le droit à la ville.
Pour répondre à cette crise, deux ensembles de propositions nous semblent prioritaires :
1. Un plan d’urgence pour le logement et la ville
Face à la crise, beaucoup d’habitant-e-s des quartiers populaires vivent des difficultés économiques qui impactent leur capacité à payer le loyer et les charges. Si rien n’est fait, la crise provoquera des expulsions et une augmentation massive de la pauvreté.
Nous sollicitons les décideurs locaux et nationaux pour la mise en place de politiques publiques adaptées et robustes, pour répondre aux enjeux révélés par la crise sanitaire, sociale et économique.
C’est pourquoi nous demandons :
- la suspension du loyer et des charges pour les familles en difficulté.
- l’interdiction des expulsions sans solution de relogement.
- un fonds de compensation pour les bailleurs et les services publics locaux impactés.
Ces mesures d’urgence sont à intégrer dans un plan exceptionnel pour le logement et la ville co-construit avec les habitant-e-s, dans le respect des règles environnementales, visant à :
- Inscrire l’objectif de 30% de logements sociaux pour 2030 dans le Plan local de l’habitat et à l’échelle des quartiers pour lutter contre la ségrégation urbaine.
- augmenter substantiellement le nombre de place en hébergement pour répondre à l’objectif zéro personne à la rue.
2. La démocratisation de la fabrique de la ville
Depuis des années, les organisations d’habitant-e-s exigent d’être associées à la fabrique de la ville. Malgré la réforme de la politique de la ville en 2014 qui a introduit le principe de co-construction, les changements concrets se font toujours attendre, en particulier lors des opérations de logements sociaux qui sont souvent une aberration écologique et sociale.
Pour remettre les habitants au centre de ces projets, nous demandons de:
Ouvrir à tous les citoyens et leurs représentants les instances techniques et politiques des projets urbains pour assurer la transparence de l’action publique et la véritable co-construction des projets.
Instaurer des instruments de démocratie directe, tel le référendum d’initiative citoyenne, pour favoriser l’expression réelle des premiers concernés sur les projets contestés comme les démolitions.
Mettre en place des moyens financiers spécifiques, tels le fonds d’initiative citoyenne ou le 1% citoyenneté, pour doter les habitants des moyens nécessaires à une expertise indépendante et à la reconnaissance de leurs savoirs d’usage.
Démocratiser le fonctionnement des bailleurs sociaux à travers la gestion urbaine de proximité et la co-construction des opérations de réhabilitation.
Réformer l’agence nationale de rénovation urbaine (ANRU) par un projet de loi qui renforce la place des habitants et la mise en œuvre d’un agenda pour le droit à la ville.
Journée d’action le 20 Juin 2020
Les collectifs ont réalisé une journée d’action simultanée dans différentes villes à travers des actions locales et/ou des convergences avec les mobilisations sociales (cortège pour la régularisation des sans papiers, logement pour tout-e-s, action contre les violences policières…).
La solidarité à l’échelle des villes qui s’est développée dans cette période de crise montre à quel point celles-ci peuvent incarner des îlots de résistance et être les lieux d’expérimentations de luttes porteuses de nouveaux projets de société.
Retrouvez toutes les propositions sur le site internet www.agendadroitalaville.fr et n’hésitez pas à diffuser ces propositions avec le hashtag #droitalaville
Premiers Signataires : Alliance Citoyenne (Grenoble), Appuii (St Denis), Atelier Populaire d’Urbanisme de la Villeneuve (Grenoble), Atelier Populaire d’Urbanisme de Fives (Lille), Droit à la Belleville (Paris), Droit à la Ville DZ (Dounarnenez), Grenoble en mouvement (Grenoble), LDH 13 (Marseille), Ric Arlequin (Grenoble), Transform (Grenoble), Utopia Rhône (Lyon), Un Centre Ville pour Tous (Marseille), Solidarité Villes (Toulouse)
Avec le soutien de la Plateforme Globale pour le Droit à la Ville www.right2city.org